Aurélie Menaldo
Paradis Perdus
Polysémique et multicolore, l’univers d’Aurélie Menaldo évoque l’enfance, le sacré, mais aussi l’absurde à la manière surréaliste. Son travail artistique commence par la récolte de toute sorte d’objets qu’elle choisit pour leurs apparences, matières et teintes. A partir de ce vocabulaire de base, elle compose et assemble des sculptures et des installations qu’elle conçoit le plus souvent en fonction du lieu d’exposition. En parallèle elle collectionne des extraits de textes qui viennent ponctuer ses créations et inspirer les titres. Ses œuvres suscitent un sentiment à la fois de familiarité et d’étrangeté, causé par la combinaison improbable d’éléments connus.
Aurélie Menaldo privilégie le geste élémentaire pour réaliser des sculptures simples, immédiatement appréhensibles, mue par une logique proche de celle de l’enfant capable de créer un monde fantastique à partir des choses du quotidien. Elle détourne la destination première des objets, en leur conférant une fragilité et un équilibre précaire, tout en les parant d’une esthétique qui dialogue avec le décoratif, qu’elle ne craint pas d’aborder frontalement, comme un des aspects qu’on ne peut renier dans une œuvre d’art.
Depuis ses débuts en 2007, Aurélie Menaldo crée des œuvres qui jouent sur l’ambiguïté, entre sérieux et insouciant, dangereux et inoffensif, utilitaire et inutilisable. Par l’assemblage incongru d’objets et de leurs couleurs éclatantes, elle décale légèrement le point de vue, en ouvrant la voie à des récits fictionnels. Ainsi le playground réalisé à la Villa du Parc, avec son toboggan en équilibre sur un pied et sa balançoire détournée deviennent des objets inquiétants; la passerelle aux couleurs des circuits Playmobil qui envahit la galerie Octave Cowbell de Metz oblige à un parcours contraint et surélevé de fenêtre à fenêtre; de même ces tourniquets de supermarché peints en rouge peuvent fleurir un champ en friche, ou encore cette ville futuriste en miniature faite d’habitats en plastique pour rongeurs nous renvoie à nos propres absurdités. En intérieur ou dans l’espace public, le procédé demeure identique et nous fait entrer de plein pied dans un monde dystopique où des oiseaux-baudruche font exploser une cage, des toupies géantes encombrent l’espace, et où des ballons de football en ciment invitent à de nouveaux jeux.
Article d'Irène Languin (Tribune de Genève)